Sophie Vannier (La Ruche) : « Le commercial ne vend plus qu'une offre mais aussi ses aspects durables »
Du 18 septembre au 8 octobre a lieu la semaine européenne du développement durable. L'occasion de faire le point avec Sophie Vannier, présidente de l'incubateur d'entreprises La Ruche, sur le "verdissement" du métier de commercial. Entretien.
Je m'abonneVous observez un évolution des métiers en lien avec la transition écologique. Qu'entendez-vous par métiers verts et métiers verdissants ?
Sophie Vannier : Il faut bien distinguer les métiers verts et les métiers verdissants, qui n'ont pas la même finalité. Certains vont se créer alors que d'autres vont prioritairement se transformer. Il existe une nuance qui a toute son importance : les métiers dits verdissants n'ont pas une finalité environnementale, alors que les métiers verts ont pour finalité de contribuer à prévenir, maîtriser et corriger les impacts négatifs sur l'environnement. Ainsi, un métier verdissant est un métier qui évolue pour répondre aux nouveaux enjeux que la transition écologique.
Cette tendance au verdissement des métiers au sein des entreprises, qui n'est pas nouvelle, s'accélère et est corroborée par les derniers chiffres d'études récentes : 1,1 million d'emplois seront nécessaires pour assurer la transition écologique d'ici à 2050 ; 78% des entreprises disposent d'une équipe dédiée à la RSE et presque tout autant (76%) d'un budget spécifique(1). Par ailleurs, le nombre de sociétés à mission a augmenté de 34% en 2023(2).
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Beaucoup d'entreprises s'attèlent à réduire le bilan carbone de la flotte automobile des commerciaux. Est-ce là un signe du verdissement du métier de vendeur ?
S.V : Plus important pour le commercial, avant de se rendre en rendez-vous client en voiture électrique, c'est de se demander s'il le fait pour une bonne raison. Le commercial doit être convaincu des efforts fournis pour réduire l'empreinte carbone de l'offre qu'il vend, de la réflexion en interne autour de l'offre elle-même, et ce sur l'ensemble de la chaîne de valeur. Cela lui confère un rôle beaucoup plus "macro" puisqu'il ne commercialise plus une simple offre mais aussi ses aspects durables, réparables, recyclables. L'entreprise doit donc fournir un vrai travail de sensibilisation et de formation envers sa force de vente autour de l'offre : son sourcing, les matières utilisées, la provenance des matières premières, la gestion des déchets, etc.
Sophie Vannier est présidente de La Ruche, incubateur d'entreprises qui les accompagne depuis 15 ans à devenir pérennes économiquement tout en étant le plus vertueuses possible.
Existe-t-il d'autres aspects entrant dans le verdissement du métier de commercial ?
S.V : Oui, je pense notamment à tout ce qui est supports commerciaux et marketing. Le commercial a à sa disposition tout une panoplie d'outils, digitaux ou papier, pour l'aider à vendre. Il existe des solutions pour mesurer l'impact carbone de chacun de ces dispositifs, comme l'appli Carbo, une start-up que nous avons accompagnée, qui propose de mesurer les empreintes carbone des entreprises notamment.
Comment les entreprises peuvent accompagner les commerciaux qui voient leur métier verdir ?
S.V : Grâce à la formation et à la montée en compétences. Il faut aider les commerciaux à acquérir de nouvelles connaissances en matière de RSE autour de l'offre, mais surtout à projeter la valeur de l'offre qu'ils commercialisent au-delà du prix, ce qui implique un changement de posture. Ce soutien est particulièrement essentiel car bien souvent, en recherchant une offre plus durable, les prix augmentent. Il faut donc armer les commerciaux à soutenir et à convaincre du bien fondé de cette hausse.
Qu'en est-il de la dimension sociétale ?
S.V : Beaucoup de travail est fait et reste à faire autour du biais des relations humaines, qui impacte inévitablement les relations commerciales. Communication non violente, dépassement de la dualité hommes-femmes : beaucoup d'éléments peuvent être abordés au sein d'une force de vente. Par ailleurs, n'oublions pas que si le métier de commercial est verdissant, celui de l'acheteur l'est aussi. Il est regardant sur les critères RSE d'une offre, attend des éléments tangibles de la part du commercial, et, sur le volet sociétal, favorise des achats inclusifs.
(1) Baromètre RSE 2024 réalisé par l'Institut Kantar
(2) Observatoire des Sociétés à Mission 2024