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Méthodologie

La boîte à outils de la Négociation
Chapitre II : Agir en négociateur

Fiche 01 : La doctrine : prévoir ses scénarios

  • Retrouvez 7 fiches outils dans ce chapitre
  • Publié le 11 déc. 2017
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La boîte à outils de la Négociation

7 chapitres / 52 fiches

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S'adapter aux comportements de l'autre


En résumé

Cette approche, la doctrine, est une transposition en négociation d'un modèle de stratégie militaire. Il fait interagir à la fois les objectifs et les différentes hypothèses de comportements adverses.

La doctrine vous permet de prévoir en amont des plans et des scénarios, à partir de ces différentes hypothèses imaginées, sur le comportement de ses interlocuteurs. La doctrine va donc vous permettre d'être plus performant lors de la négociation en accroissant votre vitesse de réaction grâce à vos prévisions.

Ce modèle est utilisé tant en préparation de la négociation que dans sa conduite.


Pourquoi l'utiliser ?

Objectif

Avoir une grande vitesse de réaction face aux changements de comportement des interlocuteurs.

Contexte

La doctrine est la modélisation stratégique (inspirée de Bonaparte, 1793) utilisée pour préparer les plans de bataille. On anticipe les diverses façons de préparer en articulant sa réflexion sur trois territoires : les modes de combat, les armements et la logistique.

Ce modèle est transposé ici à la négociation, les modes de combat deviennent la palette tactique (cf. outils 31 à 38). Les armements sont les arguments et la logistique est la réflexion sur l'espace et le temps.

Comment l'utiliser ?

Étapes

Le négociateur parcourt cinq étapes :

  • Fixer les objectifs : bien définir ses objectifs ; les fixer par l'analyse des rapports de force (cf. outils 3 et 4).
  • Définir des hypothèses : en regard des objectifs fixés, imaginer les hypothèses A, B, C, D, E qui correspondent aux attitudes et aux réactions possibles de l'interlocuteur. Classer vos hypothèses en donnant une place particulière à l'hypothèse du pire.
  • Choisir des arguments : pour chaque hypothèse, A, B, C, D, E, choisir les arguments dont vous avez besoin. Qu'est-ce qui justifie l'hypothèse A par rapport à B, etc. ? Quels sont les arguments pour défendre chacune des hypothèses ?
  • Choisir des tactiques : sélectionner les outils tactiques à employer pour chacune des hypothèses (cf. outils 31 à 38).
  • Gérer l'espace et le temps : prévoir, pour chacune des hypothèses, la gestion du temps et de l'espace. Pour le temps, déterminer la fenêtre de tir (cf. outil 20) et se fixer le rythme de la négociation. Pour l'espace, déterminer l'organisation matérielle de la négociation.

La doctrine est donc comme le sommet d'une pyramide dont la pointe se trouve à l'interaction des objectifs du négociateur et des différentes hypothèses de comportement des interlocuteurs, et dont la base repose sur trois points : les outils tactiques, les arguments et la gestion de l'espace et du temps.

Méthodologie et conseils

Une fois en négociation, en fonction des différents types de réactions de l'interlocuteur, le négociateur a des plans préparés qui permettent d'anticiper : prévoir un plan B n'est pas inutile, même s'il n'est pas employé. Les arguments, outils tactiques, espace et temps, sont en interaction les uns avec les autres. Ainsi, les arguments " nourrissent " les outils tactiques qui alimentent la créativité du négociateur pour trouver d'autres arguments.

Avantages

  • Permettre au négociateur de gagner du temps et de l'efficacité.
  • Permettre d'aborder la négociation avec une préparation très complète.
  • Obliger le négociateur à développer son imagination et à objectiver sa réflexion.

Précautions à prendre

  • Ne pas perdre de vue que la doctrine est variable et donc toujours à réadapter.
  • Aborder la négociation avec un carcan rigide, " ma doctrine un point c'est tout " est catastrophique !

Comment être plus efficace ?

" On dit que je suis toujours prêt, mais quand j'entreprends quelque chose je mets les choses au pire, et j'y pense trois mois à l'avance. Et comme les choses ne sont jamais aussi épouvantables que je les avais prévues, alors effectivement je suis prêt. "

Napoléon

La mise en action de la doctrine

La doctrine en action est une adaptation souple et raisonnée de la modélisation élaborée dans la phase de préparation.

Pour chacune des hypothèses A, B, C, D, E, le négociateur a élaboré un plan qui donne lieu à l'écriture d'un scénario. Il a donc à sa disposition cinq plans A, B, C, D, E et les scénarios qui y sont liés. En fonction des différents types de réactions des interlocuteurs en face de lui, le négociateur a " sous le coude ", des plans préparés comprenant :

  • des arguments ;
  • des outils couleurs de la palette tactique ;
  • l'espace et le temps.

Cela lui permet de gagner en temps et en efficacité.

Il reste alors au négociateur à utiliser les plans préparés en fonction de ses besoins.

L'utilisation des plans et scénarios

Exemple : Les interlocuteurs sont dans le type de comportement qui correspond au plan A, vous ouvrez le dossier correspondant à ce plan et mettez en avant des arguments et choix tactiques qui ont été préparés dans le scénario A.

Si l'interlocuteur change son attitude et se projette dans ce que vous avez prévu en hypothèse D, vous sortez le plan D. Si vos interlocuteurs infléchissent leur attitude et entrent dans ce que vous avez prévu en hypothèse C, vous sortez le plan C, etc.

La doctrine permet au négociateur, à partir des plans qu'il a préparés, de réagir plus vite aux changements de comportement des interlocuteurs.

La nécessaire adaptation

Il est dangereux que le négociateur reste le nez dans ses plans, sans accepter de sortir de ce qui est écrit, car les comportements des interlocuteurs peuvent changer très rapidement.

Il faut que le négociateur " applique " en fonction de l'évolution de la négociation et des changements de comportement des interlocuteurs les différents plans et scénarios préparés.

Le pouvoir d'influence

Le fait que le négociateur ait augmenté sa rapidité de réponse par l'utilisation de la doctrine impressionne ses interlocuteurs par son professionnalisme. Cette impression peut les conduire à admettre implicitement non seulement sa rigueur dans les débats, mais aussi le créditer d'avoir ce même talent pour inventer les solutions qui permettent de sortir d'une impasse éventuelle.

Parce qu'il aura soin d'utiliser la doctrine, le négociateur peut faire face à toutes les situations, y compris les plus imprévues.

Cas : Grande surface


La doctrine du point de vue des syndicats.

Février 2010, préparation à une rencontre avec la direction.

Angle alpha (cf. outil 3) des revendications pour l'augmentation des salaires :

  • Objectif maxi : 4 % pour tous (objectif plafond).
  • Objectif mini : augmentation de 2 % (plancher, point de rupture).
  • Alternative : augmentation de 3 % (mezzanine).

Analyse du cas

Hypothèse A : action suivie par 80 % du personnel.

4 % exigés (cf. outil 34). Éventail refermé. Argument : ils sont tous avec nous. Si la grève dure, vous allez manquer de stocks : impact sur la clientèle.

Hypothèse B : action suivie par 60 % du personnel.

Repli sur 3 % en fin de négociation mais en annonçant 4. Refus de la prime au mérite. S'appuyer localement sur les magasins les plus durs : faire peur sur les actions défavorables aux clients et le manque de stock.

Hypothèse C : action suivie par 60 % du personnel mais essoufflement.

OK pour 3 % d'augmentation de salaire, acceptation de la prime au mérite, mais avec discussion sur les indicateurs.

Hypothèse D : action molle.

2 % pour tous. prime au mérite, conditions à discuter. " on s'en souviendra à la prochaine négociation ", et " vous avez déjà divisé la prime par 3 à cause de la crise ".

Patrice Stern, Jean Mouton

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