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Trois conseils pour anticiper l'évolution des relations vendeurs-acheteurs

Publié par Aude David le - mis à jour à
Trois conseils pour anticiper l'évolution des relations vendeurs-acheteurs

Les commerciaux font face à des évolutions incessantes. Quel impact cela a-t-il sur leurs relations avec les acheteurs, et quelle attitude adopter pour consolider celles-ci dans le futur ? Le chercheur à l'Ieseg Bert Paesbrugghe a livré sa vision lors du dernier BtoB Summit.

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« Qui peut encore suivre toutes ces nouvelles technologies ? » interroge le chercheur à l'Ieseg Bert Paesbrugghe lors d'une conférence au BtoB Summit, qui s'est tenu au Parc des Princes de Paris le jeudi 27 juin 2024. Les commerciaux n'ont pas le temps de tout assimiler. Et surtout, face à cette abondance, une question centrale peut être perdue de vue : Comment ces outils peuvent-ils aider à bâtir une meilleure relation client ? Trois pistes émergent de l'intervention du chercheur et entrepreneur.

1. Ne pas se précipiter sur les nouvelles technologies

Tout d'abord, Bert Paesbrugghe invite à ne pas se précipiter sur toute nouvelle technologie, et à prendre du recul, notamment à travers les tendances du « hype cycle » de Gartner, représentation graphique de l'adoption de nouvelles technologies. Une nouvelle technologie connaît quatre phases en matière d'attentes selon l'expert : d'abord une forte croissance jusqu'à aboutir à un sommet d'attentes surdimensionnées ; puis une chute des attentes jusqu'à la désillusion ; suivie d'une pente de consolidation, jusqu'à aboutir à la 4e phase qu'est le « plateau de productivité », lors de laquelle la technologie est enfin assimilée et utilisée à bon escient.

Savoir une technologie en phase de croissance peut inciter à s'y intéresser sans céder à l'emballement. Ainsi, illustre le chercheur, en BtoB, « l'intelligence artificielle générative est actuellement au top des attentes. Peut-être que certains utilisateurs se rendent déjà compte qu'elle ne leur permet pas de réaliser tout ce qu'ils souhaiteraient faire avec. Dans un an, nous serons peut-être déjà sur un plateau de productivité. »

Mais il est parfois difficile de résister à la « hype ». « Tout le monde connaît le cas de Kodak qui a raté le train de la digitalisation, et se demande désormais s'il va rater celui de l'IA... », suggère le professeur associé en management des ventes, qui suggère que « l'attitude doit être différente selon que son coeur de métier est directement affecté par la technologie ou pas ». Pour poursuivre son exemple, il explique : « Dans le secteur du logiciel, il faut absolument se saisir de l'IA. En revanche, pour une entreprise de fabrication de chaussures, l'IA peut être intéressante mais ne va pas bouleverser l'industrie ». Pour lui, la question « En quoi l'IA peut apporter de la valeur ajoutée à l'offre ? » doit toujours se poser.

2. Se concentrer sur ce que l'on maîtrise

Deuxième conseil : s'il faut évidemment garder un oeil sur les nouvelles technologies et changements macroéconomiques, il « faut faire attention à ne pas trop accentuer ses efforts sur des choses qu'on ne peut pas prévoir », souligne Bert Paesbrugghe, rappelant les conseils prodigués par le fondateur d'Amazon Jeff Bezos de réfléchir à ce qui ne va pas changer, car c'est là qu'il y a le plus de certitudes en matière de résultats et d'investissements.

Qu'est-ce qui reste stable dans le temps ? Le fait que les clients émettent des besoins. Pour le chercheur belge, ces besoins clients s'établissent sur trois niveaux. D'abord le plus basique, la « licence d'exploitation », c'est-à-dire ce qu'apporte concrètement un produit ou un service, en se souvenant que « les clients ne sont pas intéressés par la technologie mais par ce qu'elle leur permet de faire ». Selon lui, les clients cherchent notamment des solutions sources de stabilité financière, de certifications, d'adaptation aux lois, aux normes industrielles, et de plus en plus de durabilité.

Le deuxième niveau, ce sont les facteurs de valeur, ce qui améliore la perception d'une offre. Bert Paesbrugghe prévient que ces avantages perçus concernent aussi bien l'entreprise dans son ensemble (augmentation du chiffre d'affaires, diminution des risques) que l'acheteur ou l'utilisateur en tant qu'individu (commodité d'utilisation, statut social que l'achat confère...)

Enfin, les besoins des clients peuvent avoir trait à l'expérience client. Mais selon le chercheur, en BtoB, « c'est un nice to have. En BtoC, les clients sont très contents d'avoir quelque chose en plus. Mais en BtoB, ils savent qu'au final ce sont eux qui le payent et se demandent pourquoi ils devraient le faire ». Pour lui, ce qui est capital, ce sont les deux premiers niveaux. Car si la technologie peut aider à répondre à ces besoins, elle doit être perçue comme un support d'aide et non comme une solution à part entière.

3. Améliorer constamment la satisfaction client

Mais « est-on vraiment à l'écoute des clients ? » s'interroge l'expert, pour qui cela se résume à un argument de communication plus qu'à une réelle mise en pratique. Dans ses recherches sur les acheteurs, il note que ceux-ci attendent des améliorations constantes, là où les commerciaux se contentent souvent d'un one shot.

Cette satisfaction constante passe par une planification des actions à mettre en oeuvre, une réelle mise en pratique, des procédures pour apprendre des différents clients, et une adaptation en fonction des retours.

Y parvenir nécessite de mesurer la satisfaction des clients. Il cite par exemple le CES (Customer effort score), qui mesure l'effort fourni par les clients pour l'achat, l'utilisation, le contact du service client... Mais « un seul indicateur n'est pas suffisant pour vraiment voir ce qui se passe avec le client », prévient-il, et les indicateurs doivent être regardés cible par cible, pas uniquement de façon globale.

Ces mesures de satisfaction doivent être fréquentes. « Un seul entretien tous les trois mois peut comporter des biais ». Mais attention : les questionnaires avec cent questions peuvent être lourds pour les clients, d'autant qu'une seule personne n'aura pas réponse à tout. Mieux vaut envoyer au sein d'une même entreprise plusieurs questionnaires ciblés. « Cela augmente les taux de réponse ». Tout cela n'a d'intérêt que si c'est est vraiment suivi d'effets. « Le pire est d'avoir des sondages ou des entretiens, puis que rien ne se passe », assure le chercheur.

Aude DAVID

BtoB Summit 2024 - Bert Paesbrugghe de l'Ieseg

Satisfaire les clients suppose un ciblage adéquat en amont, car « on ne peut pas tout faire pour tous les clients ». Il faut aussi être transparent sur ce qu'il est possible de réaliser ou non, et dans quels délais, sous peine de décevoir les clients. « Dans l'expérience client, le plus important, c'est la constance : toujours faire un peu mieux que les attentes, plutôt que d'être fluctuant ». C'est ainsi que, alors que devenir fournisseur stratégique est un graal pour beaucoup, Bert Paesbrugghe recommande la prudence. « Parfois, devenir fournisseur stratégique est une erreur. En effet, cela coûte beaucoup de ressources ». Parfois fournisseur comme acheteur retirent plus de satisfaction dans une relation plus transactionnelle, qui ne demande pas des investissements gigantesques de la part du fournisseur, et ne fait pas miroiter à l'acheteur un service qui ne sera pas tout à fait à la hauteur.

Le rôle du management est évidemment indispensable pour coacher les équipes mais aussi potentiellement réfléchir au système de rémunération. Par exemple indexer une partie du variable sur la satisfaction client. L'objectif principal est surtout que les commerciaux ne cherchent pas à vendre à tout prix aux clients mais à « répondre à leurs besoins et leur apporter de la valeur ».

 
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