DossierPourquoi les commerciaux français ne savent pas vendre ?
Fonction clé, le commercial souffre en France d'une image négative et d'un déficit de formation pour s'adapter aux enjeux actuels. En cause, des cursus orientés vers le marketing ou le management qui n'ont pas su à temps prendre le virage du digital.

Sommaire
- De vrais freins culturels ?
- Disparité salariale...
- ... et à l'international
- Les écoles de commerce sur la sellette
- Manque de méthodologie
- Adapter les programmes
- Une fonction qui ne fait pas rêver les milleniums
- Des tournées courtes
- De l'impatience et de l'arrogance
- Redorer le blason de la fonction commerciale
1 De vrais freins culturels ?
Pour vendre aujourd'hui il ne suffit plus d'avoir du "bagout" et un peu de charme. Sur les marchés, la concurrence est rude, les bases de données prospects hyper-sollicitées et les acheteurs sur-informés. La fonction commerciale se transforme. Et la vente exige autant de méthode que de talent. Les commerciaux français s'en tirent-ils moins bien que les autres ? Possible. Surtout, leur métier n'a pas la cote. "En France, vendre ce n'est pas bien", dénonce Pascal Py, dirigeant de Forventor, cabinet spécialisé dans le conseil et la formation commerciale. L'expert pointe les racines judéo-chrétiennes d'un pays qui n'a pas su s'en départir. La première raison du manque de performance serait donc d'ordre culturel.
Pire, l'absence de reconnaissance et l'image négative de la fonction commerciale détournent les candidats. Gaëlle Menin-Urien, manager de l'offre formation vente et négociation pour le groupe Cegos, confirme le frein culturel et le regrette "car la fonction commerciale recrute !" observe-t-elle. Surtout, les écoles de commerce ne formeraient pas à la vente et délègueraient, de fait, cette mission aux entreprises. Or, il existe de fortes disparités dans les sociétés selon leur taille. Avec, d'un côté, les grands groupes qui forment leurs commerciaux avec beaucoup de méthodes et, de l'autre, les PME qui emploient des forces de vente apprenant leur métier sur le tas : "il n'est pas rare d'accueillir en stage des commerciaux qui exercent depuis sept ou huit ans et dont c'est la première formation aux techniques de vente", précise-t-elle.
Lire aussi : Apprentissage, voie royale du recrutement ?
La place des commerciaux dans l'organigramme des entreprises serait également en cause. Les directeurs commerciaux ne pèseraient pas assez lourd au sein des comités de direction. "En France, les entreprises sont organisées en zone de pouvoir (DG, DRH, DAF, etc.). La formation, alors qu'elle représente le premier levier de succès, reste le pré carré de la DRH. Le directeur commercial n'a pas le pouvoir de décision ", explique Pascal Py. Faute de position stratégique, les dirigeants commerciaux manqueraient de moyens pour créer des process et les faire appliquer par leurs troupes. Manifestement, les forces de vente sont formées au produit, puis lâchées sur les routes...
"Les commerciaux français ne sont pas moins bons que les autres"
Julie Dang Tran, directrice générale de Manutan France
"Les forces de vente françaises sont aguerries aux négociations, je ne peux pas dire que les commerciaux français sont moins bons que les autres. Mais le style est différent. Le Français est peut-être plus dans le relationnel et le Néerlandais dans l'analyse, mais l'un n'est pas meilleur que l'autre", estime Julie Dang Tran, directrice générale de Manutan France. Le groupe compte cinquante commerciaux qui travaillent en B to B et apparaissent davantage comme des partenaires conseils que des vendeurs. Ils accompagnent leurs clients dans des process de vente complexes.
"Nous avons beaucoup travaillé, avec le directeur commercial, la transformation du discours, concède la dirigeante. Nous sommes très actifs sur le sujet de la transformation des métiers et le changement d'approche". Manutan soutient les commerciaux dans leurs tâches : par exemple, le Digital Lab du groupe a développé l'application Savin'side(r) qui permet d'analyser les données des entreprises clientes et d'optimiser leurs achats indirects. Des formations et une plateforme de e-learning permettent aux forces de vente de maîtriser l'offre de produits (150 000 références au catalogue). Enfin, la direction teste un outil de feedback afin de garder le contact et d'échanger "en toute bienveillance" avec ses commerciaux.
2 Disparité salariale...
La question de la faible influence du directeur commercial interroge. Car la fonction est l'une des mieux rémunérées et la pénurie de talents renforce cette position. Le salaire moyen d'un directeur commercial en France s'élève ainsi à 80 K€ selon une étude du cabinet de recrutement Uptoo. Celui d'un commercial à 49,7 K € et oscille entre 34,6 K € pour un jeune diplômé et 65,3 K € pour un commercial expérimenté. Malgré une certaine stagnation qui se confirme - les structures préférant mettre en avant d'autres avantages tels que la culture d'entreprise, le bien-être au travail ou le collaboratif - les salaires des commerciaux restent élevés en 2019 par rapport à d'autres fonctions.
Mais cette belle rémunération cache des disparités suivant les secteurs. Les profils exports, IT et grands comptes s'arrachent à prix d'or (entre 57 et 63 K € ). "Certains mois, j'ai vu des commerciaux gagner plus que moi. Ils sont fortement valorisés et méritent de très bien gagner leur vie. Il faut dire que ce sont eux qui ramènent l'argent. Il n'est pas rare que dans des entreprises, les directeurs commerciaux gagnent plus que les DG, cela me semble très sain", confie Jonathan Anguelov, cofondateur et COO de Aircall, start-up française spécialiste de la téléphonie d'entreprise en forte croissance.
En revanche, les commerciaux sédentaires sont à la peine (37 K € par an), pas de quoi se surpasser... "Dans les postes très push, comme la vente par téléphone, les vendeurs en France sont très mauvais, notamment en B to C", juge Gaëlle Menin-Urien. Ils apprennent la prospection en masse sur la base de scénarios pré-écrits et ne savent pas répondre aux objections qui sortent des clous. Leurs managers misent sur le volume. On est loin de l'accompagnement client !
3 ... et à l'international
Comparés à leurs homologues étrangers, les commerciaux français feraient pâle figure. Outre-Rhin, assure Pascal Py, le client est au coeur des préoccupations. "L'entreprise allemande est organisée autour d'une arête dorsale qui va de la R&D à la vente, les autres départements ne représentant qu'une arête latérale (DRH, DAF, etc.). L'acte de vente est privilégié dans l'ensemble du continuum", analyse-t-il. Et les vendeurs en première ligne ! Dans les pays anglo-saxons, ils sont également en meilleure posture. Guillaume Prince Labille, diplômé d'HEC Montréal, directeur de la business unit Grands comptes et Marchés publics en Île-de-France de l'opérateur téléphonique B to B Linkt, estime "qu'entre les commerciaux anglo-saxons et les commerciaux français, la différence est de taille".
Un élément le surprend encore : "Les Français ne cultivent pas la relation clients à long terme. Au Canada, les rencontres business afterwork permettent de devenir copains. Et, lorsqu'on change de boîte, on garde son réseau ! En France, les commerciaux zappent les contacts clients de leur employeur précédent, se privant ainsi de pouvoir rebondir". Certes, "la vente est plus valorisée dans le monde anglo-saxon, où la culture commerciale est plus affirmée que dans les pays latins ", admet Jean Muller, président national des DCF et directeur général délégué Commerce et Développement de JCDecaux. Mais son analyse se porte ailleurs : "qu'est ce que vendre aujourd'hui ? Voilà la vraie question à se poser car il est anachronique de continuer de penser que vendre se résume à du hard selling". Au-delà du cliché, la fonction se transforme en profondeur et semble prête à réaliser son autocritique.
Moins reconnue que dans d'autres pays et souffrant d'une mauvaise image, la fonction commerciale peine à imposer son leadership et en oublie les fondamentaux. Un paradoxe pour une activité porteuse d emploi et de rémunération attractive.
4 Les écoles de commerce sur la sellette
Les écoles de commerce sont sous le feu des critiques. Si les entreprises sont obligées de former leur force de vente aux techniques de base, c'est que les cursus scolaires ne s'en chargent pas. "En France, les écoles de commerce sont des écoles de gestion", résume Nicolas Dugay, DGA de Booster Academy. Pour cet expert, "depuis que le pouvoir a changé de camp - les acheteurs se l'étant approprié notamment grâce à Internet - les entreprises réécrivent leurs standards d'excellence client".
Mais le phénomène est récent et les écoles n'ont pas suivi. "Elles sont obnubilées par le marché des étudiants, pas par celui de l'emploi", grogne Pascal Py, dirigeant de Forventor, cabinet spécialisé dans le conseil et la formation commerciale. Elles soignent leur propre image en mettant en avant des disciplines à la mode. Et semblent oublier leur vocation première : former à l'acte de vente. "Je confirme que les écoles de commerce forment à l'audit, aux finances, à la gestion et au marketing. Un peu comme si la vente n'était pas un métier assez valorisant", lâche Gaëlle Menin-Urien, manager de l'offre formation vente et négociation pour le groupe Cegos.
5 Manque de méthodologie
Conséquences, les commerciaux français souffrent d'un manque de méthodologie. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si l'Afnor propose une certification "interlocuteur commercial de confiance". Depuis qu'il a invité ses commerciaux à la présenter (17 sur 20 l'ont obtenu), Laurent Besson, directeur commercial de Clair Azur, fabricant de spas, se félicite : "les dossiers sont mieux tenus, la relation client améliorée et la satisfaction en augmentation". Il a aussi pu créer et faire adopter par ses commerciaux un protocole de vente qui part du besoin client, au lieu d'aborder le sujet par de la démonstration produit.
La vente nécessite d'apprendre à collecter et analyser une information contextuelle, à prospecter au téléphone, à se rendre dans des salons professionnels, à rédiger des e-mails bien écrits, à savoir quand les envoyer, à comprendre comment une entreprise est organisée afin de cibler le bon interlocuteur, à creuser ses besoins, etc. Instiller de la méthode permet de lever les craintes et aide le commercial à oser pousser son offre. "Appliquer une stratégie de prospection commerciale est un exercice difficile, admet Gaëlle Menin-Urien. Il l'est moins lorsque les cibles ont bien été sélectionnées en amont".
"Les commerciaux mangent du Linkt"
Guillaume Prince Labille, directeur de business unit chez Linkt
Linkt a une politique de recrutement très dynamique. L'entreprise a misé sur la formation et a créé une université pour les nouveaux entrants, 70 en 2018. Les recrues suivent pendant quinze jours un parcours de formation calé au millimètre : ADN de l'entreprise, ambition sur le marché, outils informatiques et révision des fondamentaux. "Les commerciaux mangent du Linkt", résume Guillaume Prince Labille. Puis partent pour deux jours vivre la vie d'un technicien de proximité. Les managers suivent aussi des formations tous les six mois. Une "bible" de 30 pages leur rappelle leur rôle au quotidien afin qu'ils peaufinent la formation de leurs équipes.
Linkt emploie trois profils de commerciaux : des experts ayant une véritable expérience B to B et un réseau, des confirmés qui connaissent la relation B to B, et des jeunes, ouverts, qui ont envie d'apprendre. L'entreprise les forme... mais en perd en route. "Je vois partir des candidats parce que le nombre de jours de RTT est plus élevé ailleurs", se lamente Guillaume Prince Labille, qui ne ménage pas ses efforts : "je leur explique précisément nos attentes, je leur fournis l'information par secteur, des outils comme une bibliothèque des prix pour leur faciliter la tâche sur les marchés publics, un guide des références gagnées, une veille concurrentielle..."
Rien n'y fait, le taux de turn-over peut dépasser 17 à 18 % ! "Le travail dans une entreprise en hypercroissance est très dur. Il faut être résilient et déployer beaucoup d'énergie", commente Guillaume Prince Labille. Une mission difficile. Sur les 15 commerciaux entrés depuis septembre 2018, six ont déjà quitté Linkt.
6 Adapter les programmes
"Il faut prendre en compte la transformation profonde des métiers commerciaux", affirme Jean Muller, Président National des DCF et Maître de conférences à ESCP Europe : "Voilà pourquoi nous venons de repenser entièrement le programme certifiant Direction Commerciale au sein d'ESCP Europe Executive Education". Si les techniques de vente semblaient être, jusqu'ici, l'apanage de la formation continue, dont le but consiste à répondre aux besoins des entreprises, la situation évolue : "Aujourd'hui, la formation classique travaille dessus", affirme Christophe Carpinelli, directeur général adjoint d'Audencia Executive.
Par exemple, la négociation revient dans les programmes. "Nous avons conscience des besoins. C'est pourquoi nous avons réintroduit des cours de négociation B to B dans le master de marketing et d'ingénierie d'affaires, notre formation en alternance", avance Benjamin Morisse, directeur général adjoint de l'ESSCA School of Management. "Un enseignant-chercheur a développé un négo game pour démystifier l'image du vendeur", se félicite-t-il.
Reste qu'il faut traiter le mal à la racine. Les compétences relationnelles changent la donne. "L'Éducation nationale va enfin accorder à l'exercice de prise de parole en public la place qui lui est dû, c'est la mère des compétences", souligne Nicolas Dugay. La réforme du baccalauréat est plutôt bien perçue, mais il faudrait aller plus loin : "comme reconnaître l'intelligence émotionnelle", souffle Jean Muller qui ne constate pas d'écart dans les programmes entre les différents pays européens.
Pour autant, face aux pays étrangers, la formation des commerciaux pêche par deux aspects : d'une part, la capacité à apprendre les soft skills et, d'autre part, la pratique des langues étrangères. "Les Belges parlent trois ou quatre langues. Il faut dire qu'à l'école, ils osent se lancer et ont droit à l'erreur. Chez nous, la culture de la perfection crée de l'empêchement", estime Nicolas Dugay.
Par ailleurs, ajoute-t-il, "nous renforçons nos points forts quand il faudrait améliorer nos points faibles !" Les étudiants des écoles de commerce sont formés au droit de la concurrence et au droit des contrats, alors que toutes les entreprises disposent d'un service juridique et que les avocats sont là pour ça... "Bref on perd du temps en ne plaçant pas le curseur au bon endroit", conclut Nicolas Dugay.
Formation Accusées de s être détournées des fondamentaux de la vente, certaines écoles de commerce révisent leurs programmes pour s'adapter aux réalités du marché.
7 Une fonction qui ne fait pas rêver les milleniums
La fonction commerciale peut se targuer de créer des emplois et de les rémunérer correctement. Mais elle présente un handicap de poids : elle n'attire pas les jeunes. Pourtant, "la mutation en cours représente une formidable opportunité, la vente devient plus inclusive, plus collaborative, les commerciaux se transforment en consultants avec de hauts niveaux d'expertise. Le mouvement des Dirigeants Commerciaux de France est ainsi à l'initiative de la création d'une chaire dédiée à la transformation commerciale à l'ère du numérique, en partenariat avec em lyon business school", déclare Jean Muller, leur président national.
Il n'empêche, force est de constater que ce qui motivait leurs aînés semble laisser les jeunes indifférents. À quoi rêvent les étudiants en école de commerce ? À intégrer les Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon), les grands cabinets d'audit et de conseil (EY, Deloitte, KPMG et consort) ou encore des établissements financiers (Goldman Sachs) selon le cabinet d'études Universum, qui passe chaque année leurs attentes au peigne fin. Nous sommes loin de l'univers des grandes marques qui reculent. S'ils sont attentifs aux perspectives de revenus, les jeunes souhaitent rejoindre une entreprise représentant une bonne référence professionnelle pour leur future carrière. À long terme, ils cherchent un bon équilibre de vie, une sécurité et à diriger une équipe.
8 Des tournées courtes
Aujourd'hui, l'argent ne fait plus rêver les jeunes. "Ils se fichent d'être propriétaires car les prix de l'immobilier sont trop élevés et ils préfèrent utiliser BlaBlaCar plutôt que d'acheter une voiture. La différence avec ma génération est énorme. À l'époque, les dents des commerciaux rayaient le parquet", témoigne Guillaume Prince Labille, directeur de business unit chez Linkt. Ce n'est plus le cas désormais. Les générations X ou Y s'intéressent à la qualité de vie au travail, à la visibilité de leurs évolutions professionnelles, à leur développement personnel au travers des formations, etc.
"Les jeunes commerciaux souhaitent préserver leur équilibre vie personnelle / vie professionnelle. Par exemple, ils refusent de partir en déplacement une semaine entière. Un ou deux jours, oui, mais pas plus", relate Laurent Darous, directeur commercial de Soprofen, fabricant de fermetures, qui anime une force de vente d'une quarantaine de commerciaux. Le manager doit accepter et composer avec ces nouveaux comportements. "Nous essayons de les responsabiliser", poursuit-il. Mais tant que les indicateurs de résultats sont bons, le directeur commercial ferme les yeux. Au flicage, il préfère l'animation régulière. Aux coups de semonce, l'implication des collaborateurs dans le projet de l'entreprise. Une posture qui colle aux désirs des jeunes et à leur état d'esprit.
"Les jeunes veulent appartenir à un projet qui dépasse leur fonction"
David Bruneau, directeur commercial de Gibaud
Présent sur les marchés médicaux de l'orthopédie, la phlébologie et la podologie, l'entreprise Gibaud cible les professionnels de santé et les pharmacies. "Nous devons mettre de l'intelligence collective au coeur de l'entreprise car notre clientèle évolue. Nous souhaitons nous positionner comme un acteur de la santé collaborative, partenaire de confiance des pharmaciens", explique David Bruneau, directeur commercial de Gibaud.
Cela implique pour les forces de vente de changer de méthode. L'équipe constituée de commerciaux de 23 à 58 ans présente une pyramide des âges assez équilibrée et un niveau d'études autour du Bac +2 et Bac +3. "Bonne nouvelle, notre projet de santé collaborative colle aux attentes des jeunes générations qui ont besoin de se sentir appartenir à un projet dépassant leur fonction", se félicite David Bruneau.Les jeunes commerciaux ne se lèvent plus le matin simplement pour faire leur job. " Leur intérêt se porte sur des projets d'entreprise qui font sens. Ils ont besoin d'être associés aux réflexions, d'être impliqués", ajoute le directeur commercial.
L'organisation verticale est passée de mode. Et les contraintes doivent être maîtrisées . "Leur équilibre vie privée et vie professionnelle est mieux assuré. Ce n'est plus un tabou, ils n'hésitent pas à le revendiquer", lâche David Bruneau. Car les jeunes savent poser un besoin et porter leurs attentes... de vrais atouts à utiliser dans la relation commerciale. Avec son plan d'excellence commerciale mis en place sur trois ans, afin de transformer les méthodes de ventes, le manager accompagne son équipe qui passe de la vente transactionnelle à la vente relationnelle. Et se dit confiant dans l'avenir.
9 De l'impatience et de l'arrogance
Trop d'impatience. "Les jeunes, qui n'ont pas été formés au commerce, mais au management, arrivent avec une certaine arrogance. Pourtant, dans le métier, l'expérience est très importante", fulmine Jonathan Anguelov, cofondateur et COO d'Aircall. "Les milleniums sont impatients, fascinés par les success stories des start-up. Or la réalité est toute autre. Dans la vraie vie, personne ne joue sa carrière professionnelle durant les deux premières années", poursuit le dirigeant.
La réalité exige de redescendre sur Terre. Ce qui, pour un débutant, consiste à appliquer des méthodes et des process et à apprendre de ses échecs. Un concept qui a du mal à passer auprès des jeunes. Si le métier de commercial n'attire pas les étudiants qui lui préfèrent le marketing, le management ou le digital, "c'est qu'ils ne souhaitent pas s'exposer aux relations transactionnelles", estime Guillaume Prince Labille. "C'est un métier très exigeant et très contraignant. Il faut être affûté, bien se positionner, cultiver une hygiène commerciale, savoir se présenter, etc.", poursuit-il. De fait, dans une force de vente, les performances sont mesurées et, chaque mois, les résultats des commerciaux sont comparés. "En cas d'échec individuel, il est quasi impossible de se cacher derrière les aléas du marché", assure Guillaume Prince Labille.
10 Redorer le blason de la fonction commerciale
En France, les jeunes rechignent à être en face du client, à la différence de leurs camarades anglo-saxons qui envisagent les relations de manière beaucoup plus directes. Face à ce désamour, les écoles et les entreprises multiplient les initiatives pour redorer le blason de la fonction commerciale. L'IUT Nancy Charlemagne a créé "Les Négociales", un concours de négociation commerciale qui permet aux entreprises de repérer les futurs talents.
Les diplômes évoluent aussi. Ainsi, le BTS Négociation et Relation Client (ex-Force de vente) s'est vu adjoindre un D en 2018 pour devenir BTS Négociation et Digitalisation de la relation client. En 2019, c'est au tour du BTS MUC (management des unités commerciales) de muter en MCO (management commercial opérationnel) et d'intégrer la dimension digitale afin de combler le retard. Même le vocabulaire se transforme. Les vendeurs cèdent la place aux conseillers ou experts. Tout est mis en oeuvre pour renverser la tendance.
La carrière commerciale ne fait plus rêver les jeunes qui s en détournent ou l accomplissent à regret. Une situation qui devra évoluer à l'aune de la transformation de la fonction.
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