IA et sales : le manager, chef d'orchestre de la transformation
Pas de transformation sans leadership. À l'heure où l'IA s'invite dans les équipes commerciales, les managers doivent montrer l'exemple, sécuriser les usages et donner du sens. Une posture exigeante, partagée avec conviction lors d'une table ronde animée du Club Action Co.

L'IA s'installe dans les pratiques commerciales... mais qui en pilote vraiment l'usage ? Lors d'une table ronde animée par la rédaction le 11 avril 2025, plusieurs managers commerciaux membres du Club Action Co ont livré leur conviction : le rôle du manager est clé. Non seulement pour poser un cadre, mais aussi pour incarner la transformation, l'évangéliser, et arbitrer entre innovation et continuité opérationnelle.
La sécurité avant tout
Premier défi : sécuriser les usages. Shadow IT, comptes personnels, données sensibles... Hafid Ouchene, président de HO Strategy & Growth et ex-directeur commercial de BBC Bircher Smart Access, a vécu le cas concret d'un collaborateur en MBA, qui mélangeait données internes et outils IA non autorisés. « On a mis en place une charte d'usage, mais on a compris très vite que signer ne suffisait pas. Il faut accompagner, faire vivre le cadre, répondre aux questions. »
Même vigilance chez Sabrina Ars-Long, directrice commerciale marché grand public d'Engie, qui a préféré internaliser les outils : « On utilise Copilot dans un environnement sécurisé. Tout est documenté : juridique, réglementaire, cybersécurité. Cela permet d'avancer sans freiner l'innovation. » Une manière de répondre aussi aux multiples initiatives personnelles souvent invisibles des directions.
Embarquer les forces de vente
Deuxième enjeu : mobiliser les équipes. Tous les intervenants en conviennent, l'IA n'est pas (encore) un réflexe pour les commerciaux. D'où la nécessité de les former, les motiver, et surtout, de montrer l'exemple. Georgy Sicaire, directeur des ventes de Moody's Analytics, partage ses bonnes pratiques : « J'utilise l'IA pour préparer mes analyses, je le montre, je l'explique. Petit à petit, les managers me challengent, on échange nos manières de faire. Le plus important, c'est de partager le "comment" et pas juste le résultat. »
Ce rôle d'ambassadeur, Ludovic Rateau, CEO de Ringover, le revendique aussi : « Il faut s'adapter aux personnes qu'on a en face, comprendre ce qui coince dans leur quotidien et les aider à trouver une autre manière de faire. » La pédagogie passe souvent par des cas très concrets, proches du terrain, et par des workshops réguliers. « Un ou deux use cases bien choisis, animés par des opérationnels, sans jargon IT », précise Georgy Sicaire.
La dimension humaine de cette transformation revient souvent. « Il faut aménager du temps », insiste-t-il. « L'excuse du "je suis débordé" est vraie, mais on ne peut pas faire évoluer les pratiques si on ne crée pas un espace pour ça. » Sabrina Ars-Long va dans le même sens : « On a été accompagnés pour structurer des cas d'usage courts, indépendants de l'IT, afin que les projets ne durent pas un an. »
Enfin, pour passer à l'échelle, le collectif prend le relais. Jean-Philippe Clair, directeur Offre Marketing Communication au sein du cabinet d'expertise numérique ASI (et ex-Keyrus) évoque la création d'un réseau de champions, des sales moteurs, testeurs, prescripteurs. « On leur donne un accès en avant-première à certains outils, en échange d'un retour d'usage. » Chez Engie, on mesure le taux d'usage par direction. « Cela nous permet d'adapter les formations et de valoriser les plus actifs », explique Sabrina Ars-Long.
Lire aussi : « L'IA générative transforme le rôle du commercial, pas son ADN », Jean-Philippe Clair (ASI)
Être manager à l'heure de l'IA, c'est donc conjuguer pilotage, accompagnement et exemplarité. Une posture résumée par Hafid Ouchene en ces termes : « Si on veut un vrai changement, il faut commencer par soi. Sinon, ça ne prend pas. »
Pour aller plus loin : 6 usages concrets de l'IA pour directeurs commerciaux
Sur le même thème
Voir tous les articles Techno