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DossierRSE : quel impact pour la fonction commerciale ?

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2 - RSE : des pratiques commerciales plus mesurées

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Entre optimisation des déplacements, outils de travail plus sobres et consommation d'énergie et de papier maîtrisée, la vente montre patte verte.

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Est-il indispensable, pour vendre, de se montrer ostentatoire ? C'est la question que se posent les managers, confrontés à une sobriété nécessaire et parfois institutionnalisée, lorsque leur société est devenue entreprise à impact ou poursuit une démarche RSE.

Longtemps, les commerciaux ont exhibé certains marqueurs statutaires : belle voiture, téléphone portable dernier cri... Autant de signes extérieurs de réussite, aptes à motiver et qui peuvent impressionner clients et prospects lors des rendez-vous. De même qu'une invitation à une table prestigieuse, ou à un événement spectaculaire à l'autre bout de la terre.

Ces pratiques semblent connaître un ralentissement, selon les entreprises que nous avons interrogées. « L'époque où le commercial arrivait chez son client de façon ostentatoire , prêt à un rapport de force, est dépassée, estime Emmanuelle Guidetti (Brother). Chez Brother, ce n'est clairement pas dans notre ADN : nous sommes « at your side », dans une relation de partenariat depuis toujours. Sur le marché en général, la crise sanitaire a quelque peu changé les habitudes en démocratisant le télétravail là où hier encore, les rendez-vous clients étaient nécessairement physiques. » On comprend bien que le « bling-bling » n'a que peu d'intérêt par écran interposé et que la visioconférence a le mérite de faire aller les vendeurs à l'essentiel.

Etre cohérent

Surtout, les entreprises privilégient la cohérence : « Nous commercialisons des équipements de traitement de l'air pour les entreprises, qui leur font économiser de l'énergie, relate Cyrille Bois, directeur commercial de Sintra. Il serait peu cohérent que nos commerciaux arrivent chez les clients en 4x4 diesel après avoir parcouru 150 km et pour ensuite retourner au bureau puis à leur domicile».

Sintra a donc mis en oeuvre une optimisation des déplacements de ses commerciaux (voir encadré) qui leur fait gagner du confort et concourt à la sobriété. Thierry Gordillo (AME Executive Search) constate : « Le mot d'ordre des entreprises est d'optimiser les coûts, ce qui passe par une réduction du train de vie des commerciaux, donc des dépenses raisonnées en matière de frais : hôtellerie, restauration, véhicules moins haut de gamme et souvent hybrides, car ils sont plus autonomes. Cela a un impact sur l'image que donne l'entreprise : celle d'une entité citoyenne, proche de ses cibles et qui s'adapte aux crises, sanitaire, climatique et énergétique. »

Concrètement en matière de contacts clients, les forces de vente ont changé leurs pratiques : «Elles ont appris à gérer à distance certaines relations peu profitables ou coûteuses en frais de déplacement. Il s'agit de panacher les contacts en pratiquant la visio et le présentiel. Mais aussi, les managers ont développé la flexibilité du travail au moyen de bureaux partagés et de ressources mutualisées. Ils ont également appris à manager leurs commerciaux à distance», constate Thierry Gordillo.

Mieux qualifier

Emmanuelle Guidetti énumère quelques pratiques en cours chez Brother : « Un rendez-vous client sur deux se fait à distance, ce qui réduit les déplacements au strict nécessaire. Nous tâchons de privilégier les voyages en train, et toute notre flotte automobile a basculé vers des modèles hybrides. Côté papier, nous imprimons beaucoup moins et nous rationnalisons la PLV papier en magasin. »

Pour autant, tous les rendez-vous client peuvent-ils être dématérialisés ? Pour Bruno Delezenne (Friday Link), vendre sobrement et efficacement revient d'abord à repenser la qualification des prospects et le Go/No Go. « Il convient de s'interroger sur la valeur ajoutée que l'on apporte au client : le questionner sur ses besoins pour y répondre par une vente durable et une relation pérenne. Ce qui revient à modifier et préciser son ciblage. Ensuite, le remote selling est la technique idéale pour être sobre. Trois-quarts des acheteurs en B to B disent qu'ils n'ont pas besoin de voir le commercial. Il est devenu naturel de se parler à distance et de signer en mode remote. Ce qui n'enlève rien au plaisir de se voir physiquement et de partager ponctuellement de bons moments. »

Sobriété initiale

Certaines jeunes sociétés instaurent la sobriété dès leur lancement. C'est le cas de la startup Fixter, avec sa plateforme mettant en relation automobilistes en quête de réparations et garages : «Notre activité a fait ses preuves au Royaume-Uni, mais en France, nous nous lançons. Dans ce contexte, on pourrait imaginer que nous mettons en oeuvre des moyens faramineux pour nous développer. Or, nous avons une approche quasi-chirurgicale du marché, qui va dans le sens de la sobriété. Nous prospectons les garagistes dans des zones précises, identifiées et dont nous savons qu'elles recèlent du potentiel. Nous pratiquons des tests, pour valider ce ciblage pointu. De même, pour nous faire connaître, nous allouons nos budgets marketing de manière précise, notamment en dépensant sur le digital. Il serait très déceptif de communiquer à grande échelle, pour que le client intéressé s'entende dire que nous ne sommes pas présents sur sa zone », relate Matthieu Pouget-Abadie, directeur marketing de Fixter.

Cohérence et politique des petits pas dans le développement commercial semblent être les nouveaux mots d'ordre. La sobriété s'applique bien entendu aux forces de vente indirectes, avec un souci d'exemplarité de la part des commerciaux internes.


« Il n'y a pas d'opposition entre rentabilité et sobriété »

Cyrille Bois, directeur commercial de Sintra

Fabricant de systèmes innovants pour le traitement de l'air auprès de clients B to B, l'entreprise italienne Sintra est devenue en 2019 « société Benefit », premier pas vers l'obtention du label B Corp qui implique la recherche d'un bénéfice pour la collectivité.

« La notion de sobriété énergétique est ancrée dans nos statuts, explique Cyrille Bois, directeur commercial de la filiale française qui anime une équipe de 35 commerciaux. Nous nous sommes concertés en interne pour examiner comment concilier sobriété et rentabilité, et avec le recul, nous constatons qu'il n'y a pas d'antagonisme. »

Concrètement, depuis 2020, Sintra a réduit de 30% le kilométrage annuel de ses commerciaux en optimisant les déplacements. «Le fait de cartographier les clients, de rationnaliser les trajets, de ne pas repasser systématiquement au bureau a permis une baisse de coûts et d'émissions carbone pour l'entreprise et un confort de travail pour les vendeurs ». Lesquels sont sensibilisés à ne pas faire plus de 150 km en voiture par jour, à utiliser le train et les transports en commun.

« Par ailleurs, au moins 20% des rendez-vous sont réalisés en distanciel », précise le directeur commercial. Enfin, pour les déplacements indispensables, l'entreprise a investi dans des véhicules hybrides haut de gamme, lesquels sont appréciés des commerciaux pour leur technicité et leur image valorisante.

Olga Stancevic

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