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Création d'une académie de vente chez Martin Belaysoud : de la formation à la transformation

Le groupe de distribution professionnelle Martin Belaysoud a souhaité mettre en place une académie des ventes. Un chantier qui révèle bien des difficultés, dues au décalage entre objectifs, attentes et réalités. Témoignage.

Publié par Aude David le - mis à jour à
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Véronique Mie de Martin Belaysoud
© Aude DAVID - ActionCo
Véronique Mie de Martin Belaysoud

Doubler son chiffre d'affaires et ses effectifs en cinq ans, homogénéiser sa présence sur le territoire, : tels sont les objectifs du plan stratégique lancé en 2021 par le spécialiste de la distribution professionnelle Martin Belaysoud. Au fil des décennies, la quincaillerie familiale créée en 1829 à Bourg-En-Bresse se développe, diversifie ses activités dans la distribution professionnelle, crée et achète plusieurs marques. Le groupe, qui enregistre 1,2 milliard d'euros de chiffre d'affaires et 120% de croissance sur cinq ans, est toujours en cours de consolidation et afortement structuré ces dernières années l'activité de ses 3000 salariés, répartis sur 232 sites en France.

Former 900 commerciaux et 200 managers en 4 ans

Pour accompagner cette croissance, il met sur pied une académie des ventes. Celle-ci s'inscrit aussi dans la stratégie RH et RSE de l'entreprise, pour « préparer l'avenir et les futures compétences nécessaires » mais aussi fidéliser les salariés, raconte Véronique Mie, responsable du développement des ressources humaines, lors d'une conférence organisée en février par Salesapps et B-Flower à Paris. « Martin Belaysoud n'est pas une marque employeur aussi forte que ses concurrents », reconnait-elle. Développer l'aspect formation pourrait donc accroître l'attractivité du groupe, et la rétention des collaborateurs, car « il est plus facile de garder les talents si on est capable de les faire évoluer ».

« Il est plus facile de garder les talents si on est capable de les faire évoluer », Véronique Mie

Cette académie vise également à homogénéiser les pratiques, un enjeu réel suite à plusieurs rachats, notamment dans des secteurs nouveaux pour le groupe, comme celui des énergies renouvelables. Par ailleurs, l'école a aussi pour but d'accompagner la force de vente face aux changements (refonte de l'ERP, mise en place du CRM, évolution des schémas logistiques) et les managers dans leur mission de coaching.

Dans un premier temps, l'école s'ouvre aux deux marques historiques du groupe, Tereva (second oeuvre du bâtiment) et Mabéo Industries (équipements de protection individuelle), avec l'ambition de former leurs 900 commerciaux et 200 managers en quatre ans sur l'un des trois parcours techniques de vente : vente itinérante, sédentaire et grands comptes, ou sur le parcours management commercial. Le cahier des charges met en avant un « projet de groupe, qui transcende les enseignes », selon Valérie Mie, énonçant le renforcement de compétences clés (prospection, négociation, pilotage commercial), une formation en blended learning et la création de référentiels des bonnes pratiques. La formation dure généralement 15 mois (18 à 24 mois pour les key account managers), avec une évaluation à l'entrée et à l'issue du parcours.

Un écart entre ambitions, attentes et réalité

Après un appel d'offres à l'été 2023, l'agence B-Flower est choisie pour accompagner le groupe dans ce projet ambitieux. Après un travail immersif au sein du groupe en fin d'année 2023, le programme de formation des managers voit le jour en février 2024. Véronique Mie observe alors « un écart entre nos ambitions, les besoins des collaborateurs et la réalité. Les managers attendaient beaucoup en termes de pratiques managériales, là où la formation portait davantage sur le pilotage commercial ». Autre imprévu « les pratiques, beaucoup plus hétérogènes que ce que nous avions perçu ».

La responsable RH observe aussi des résistances au changement, accentuées par la contraction du marché. Dans un premier temps, le déploiement est « complexe, avec du mal à embarquer les managers dans une posture de coach ». Elle se souvient notamment d'un séminaire organisé pour recueillir les besoins et expériences de 48 managers de niveaux et d'enseignes différentes lors duquel il ressort que « leurs outils, stratégies et approches sont très différents pour les uns et les autres ». Difficile de mutualiser et d'harmoniser. « B-Flower a transpiré pour tout réorganiser pendant deux jours, en gardant la volonté de désiloter, car certaines marques sont présentes dans la même ville sans que les équipes ne se connaissent... »

Un projet de (trans)formation

Si la direction générale est sponsor du projet, « le top management n'est pas pour autant aligné, avec des sémantiques diverses pour évoquer la stratégie du groupe », observe Sébastien Chapiseau, directeur commercial de B-Flower. L'agence a donc décidé d'impliquer la direction générale pour opérer un réalignement. « Le sujet allait au-delà d'un programme de formation, il s'agissait en réalité d'un vrai projet de transformation », ajoute-t-il.

Au fur et à mesure, témoigne Véronique Mie, les postures évoluent, et l'académie des ventes devient finalement « un projet catalyseur, qui fait remonter des points de transformation générale, pas seulement RH ; un accélérateur de prise de conscience des étapes nécessaires à la transformation ». Ainsi, l'école participe à la transformation commerciale, le dialogue entre managers et l'échange de bonnes pratiques émergent, avec pour résultat « les remontées terrain incroyables » selon la responsable RH.

Dans cette formation en partie à distance, notamment pour les managers, le « taux de suivi du e-learning n'est pas de 100%, c'est encore un sujet », reconnait Véronique Mie. Pour Sébastien Chapiseau, « la digitalisation croissante post-Covid laisse peu de place à la formation en ligne. Il faut donc miser sur des modules très courts, et des classes virtuelles en petit groupe, permettant dynamisme et feedback en temps réel ».

Puis faire un suivi. D'abord avec la validation des acquis en fin de formation. Ensuite lors de l'entretien annuel, où le manager peut évaluer la progression du salarié avec un référentiel de compétences. « Dans ce type d'académie, la communication est primordiale, avant, pendant, après, avertit Sébastien Chapiseau. Nous organions une cérémonie de remise de diplôme, même si la formation n'est pas certifiante, et le major de promo vient ouvrir la promo suivante. ».

Selon la responsable RH, la formation se faisant progressivement sur quatre ans, les équipes voient petit à petit une amélioration de la performance commerciale chez leurs collègues. Le meilleur moyen pour embarquer des forces commerciales.

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