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Comment une avant-vente d'une décennie a permis à Lafarge de se différencier

Publié par Aude David le | Mis à jour le
Comment une avant-vente d'une décennie a permis à Lafarge de se différencier

L'industriel Lafarge a vécu un cycle de vente avec une avant-vente... dépassant les dix ans. L'occasion de proposer une solution innovante au donneur d'ordres et de remporter un marché sur lequel l'entreprise n'était pas spécialiste.

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Si le coeur de métier de l''industriel Lafarge est la fabrication et la vente de matériaux de construction (béton, ciment, granulat), le groupe se lance parfois dans de plus grands projets de vente complexe. Il s'est ainsi intéressé à la fourniture de béton au projet de tunnel ferroviaire Lyon – Turin. « C'est un projet absolument énorme, très demandeur en béton », assure Yves Baroulier, directeur grands projets de Lafarge France : 80 centimètres d'épaisseur pour tapisser un tunnel de deux tubes de 57 kilomètres.

Or cela n'entre pas dans son terrain de jeu habituel. " Après analyse, il fallait gagner l'appel d'offres par la différenciation technique, explique Yves Baroulier lors de la dernière RiiM Conférence organisée par Perfluence et Advertech. L'avant-vente était d'une dizaine d'années, on pouvait anticiper, mener des recherches en innovation ». Lafarge propose alors une innovation pour recycler au moins 75 % des matériaux issus du creusement du tunnel, une demande forte des pouvoirs publics, jusque-là insoluble.

Approcher tout l'écosystème

Pour maximiser ses chances de remporter le marché, Lafarge veut comprendre les processus et critères de décision. Le groupe adopte « une approche de l'écosystème plutôt que des acteurs individuels » : les maîtres d'ouvrage, c'est-à-dire les décideurs, France, Italie, Union Européenne, réunis dans la société TELT (tunnel euralpin Lyon – Turin) ; les maîtres d'oeuvre, bureaux d'études qui assurent l'ingénierie et la conduite opérationnelle des travaux ; les entreprises réalisatrices qui signent les contrats d'exécution ; et leurs fournisseurs, rôle que brigue Lafarge.

Contractuellement, ces prestataires n'ont pas de relation directe avec le maître d'ouvrage. « La difficulté pour les industriels, est de se faire entendre dès l'amont du projet par toutes les parties prenantes avec le bon discours au bon moment », explique Yves Baroulier.

Aude DAVID

Aude DAVID

Yves Baroulier, directeur grands projets de Lafarge France


Lafarge décide de rentrer en relation avec le client final dès le début. "Ce n'est pas évident car la loi sur la maîtrise d'ouvrage public est très cadrée en matière de relation publique avec les acteurs. Mais quand en 2009 nous autres industriels avons mis le doigt sur la problématique, nous avons eu l'oreille du maître d'ouvrage, très intéressé en amont. Quand il a compris que les industriels avaient des choses à dire, nous avons avec l'un de nos confères, une institution académique et le maître d'ouvrage passé une convention de développement pour travailler sur cette solution très en amont", poursuit-il.

Si la définition du projet a commencé en 2009 (bien que l'idée soit beaucoup plus ancienne), Lafarge engage des relations formelles dès 2012, bien avant l'appel d'offres. Pour le responsable des grands projets de Lafarge, « tout s'est joué dans cette phase ».

Nouer des partenariats industriels

Comme la composition de la roche présente sur le site est a priori réglementairement non conforme pour produire du béton, l'entreprise milite pour une modification de la règlementation, afin que sa solution puisse être développée et mise en pratique. Le maître d'ouvrage va alors intervenir directement auprès de l'Afnor, responsable des normes, pour pouvoir mentionner cette solution dans le dossier de consultation des entreprises. « Les marges de manoeuvre sont plus importantes au début. Au moment de la diffusion du DCE, tout est joué, il n'y a plus de temps pour proposer une innovation technologique », assure Yves Baroulier.

Une fois la solution répertoriée dans le DCE, elle peut être présentée par toutes les entreprises réalisatrices candidates à l'appel d'offres, lancé en 2020. « Elles nous ont toutes consulté sur la fourniture des produits pour la mise en oeuvre de cette solution », se souvient-il. Mais Lafarge souhaite aller plus loin et développer un vrai partenariat sur cette innovation. Un groupement d'entreprises réalisatrices s'y intéresse et crée une joint-venture avec Lafarge Bétons pour la mener à bien. « Nous nous sommes mis d'accord pour travailler en totale collaboration avec eux sur la phase commerciale et contribuer à optimiser leur productivité sur le chantier », se félicite-t-il.

"Ainsi, nous ne sommes plus simples vendeurs de produits mais partenaires dans la mise en oeuvre partageant les risques et les bénéfices. Ceci est possible dans le cadre de ce type de grands projets, pas pour les marchés courants », conclut-il.

 
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