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[Tribune] Être manager...oui ! Mais pour manager quoi ?

Publié par le | Mis à jour le
[Tribune] Être manager...oui ! Mais pour manager quoi ?

Avons-nous besoin d'un manager pour connaître notre niveau d'atteinte de résultats ? Avons-nous besoin d'un manager pour nous lire des présentations sur les offres ou les actions à venir ?

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Informer, contrôler, recadrer fait bien sûr partie du rôle du manager mais cela doit se faire sans notion d'autorité "posant" la notion de subordination. Fini le manager qui impose et qui est fier de diriger et de contrôler ! Manager nous oblige à une relation plus horizontale en limitant l'émergence de la supériorité du dirigeant ; le commandement devant être réservé uniquement pour des situations urgentes et/ou critiques.

Pour cela, au-delà des méthodes ou techniques, nous devons accepter qu'il n'y a pas de super-héros en management ! Ce qui nous invite dans un premier temps à avoir une posture " d'égaux VS d'égo ".

Nous sommes en apprentissage permanent, nous écoutons et acceptons la remise en cause ; la remise en question permanente et l'enrichissement mutuel, tout en conservant l'estime de soi.

Si j'imageais la posture, ce serait : " un bel appui sur nos 2 jambes en force pour nous affirmer, en ayant le petit sac à dos d'humilité qui va pour douter de nos compétences/savoir-faire " car un vrai manager est en construction permanente !

Alors pour revenir à la question... que devons-nous manager, animer ?

1. Manager et animer le sens, la première mission d'un manager

Si je fais l'analogie avec l'environnement des Sapeurs-Pompiers et particulièrement l'engagement volontaire (80 % des Sapeurs-Pompiers de France), pour qui les missions sont réalisées en plus du temps du travail quotidien.

La première motivation des femmes et des hommes qui s'engagent est le sens, le sentiment d'utilité car les sapeurs-pompiers volontaires constituent l'ossature du modèle de secours en France. D'ailleurs, dans la grande majorité des cas, lorsqu'un pompier "démissionne" de son engagement, la première raison exprimée est la perte du sens pour les missions (car la majorité des missions ne sont pas des incendies, et certaines missions de secours à personnes ne sont pas des urgences absolues mais liées à un contexte social).

Je le dis très souvent, "un vendeur d'assurance-décès ne vend pas un contrat d'assurance, il propose une solution pour protéger des proches ; on ne vend pas un crédit étudiant, on aide un jeune à construire son avenir ; on ne finance pas la maison d'un jeune couple, on les accompagne dans le bonheur du premier bien immobilier ".

Avec ce sens, la mission est plus " noble ", l'engagement est plus fort ! Et quand le sens est profond, l'atteinte de l'objectif n'est plus un choix dans notre esprit mais une mission pour laquelle nous mettons tout en oeuvre pour réussir. Cette mission (but précis et bien compris) constitue alors un défi réalisable demandant une concentration profonde en ajustant l'équilibre entre la difficulté de l'activité et les compétences qui peuvent être aidées et/ou accompagnées. (voir les 8 caractéristiques majeures du concept de flow/ Csikszentmihalyi (1) )

" Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas les hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose... Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le coeur de tes hommes et femmes le désir de la mer " Antoine de Saint-Exupéry.

Alors ne disons plus comment faire mais pourquoi le faire...

2. Oser avoir une stratégie de l'envie

Donner du sens ne suffit peut-être pas toujours pour susciter l'envie, car l'envie revient à une notion plus individuelle, et la difficulté est que nous ne pouvons pas répondre aux envies de chacun et de tous.

Néanmoins, nous savons tous que nous faisons preuve d'un haut niveau de motivation lorsque nous nous engageons dans des missions, des tâches qui nourrissent notre envie (plaisir, maîtrise, satisfaction d'apprendre, buts personnels, reconnaissance, etc.) ; et que certains leviers nourrissent l'envie de beaucoup comme la reconnaissance, la confiance, la convivialité, le respect, la sincérité relationnelle, l'empathie, la transparence et le collectif.

Certains diront que l'entreprise, ce n'est pas le "monde des Bisounours"... "Il faut faire ce qu'il y a à faire, que l'on aime cela ou non"... et c'est vrai ! Car aucun métier n'est composé uniquement de missions et de tâches qui donnent envie.

Partageant ce même constat, nous pouvons manager l'envie par une approche d'équilibre (une balance avec des plus et des moins). Notre rôle consiste à modifier la situation de travail d'un collaborateur afin d'en diminuer si possible les "tâches de désintéressements" sans toucher aux "leviers de l'envie" OU inversement d'accroître "les leviers de l'envie" sans augmenter les "tâches de désintéressements".

3. Définir et partager un cadre relationnel accepté par tous

Nous ne pouvons pas contrôler tous les évènements, les imprévus, les SAV, les difficultés... la liste pourrait être longue. Mais nous pouvons décider comment aborder tout cela et mieux encore décider en collectif nos interactions sociales, le comment travailler ensemble.

Pour rendre cela concret, Il est important de construire et d'animer un cadre de relation (et être exigeant sur son respect).

  • Chaque collectif peut définir le sien et voilà d'après moi quelques composantes intéressantes. Être exemplaire et donner confiance à chacun et à l'équipe et lui prouver qu'elle peut nous faire confiance
  • Animer et veiller en la confiance entre les membres de l'équipe
  • L'assertivité ! Les points de vue (y compris et surtout les nôtres) sont exprimés avec assertivité... ce point est important car je vois encore trop de managers (et certains membres d'équipes) avoir plus d'égo que d'égaux et donner leur opinion ou décision avec condescendance, ce qui crée des frustrations, qui peut être destructeur ou a minima faire baisser l'intelligence collective
  • Le respect et la transparence en communication

Et pour susciter davantage d'engagement, en support du cadre collectif, posons-le sur 2 jambes :

  • Valoriser et reconnaître les membres de notre équipe en nous effaçant individuellement car cela renvoie également à une valeur managériale importante qui est l'humilité : "les réussites ne sont pas de moi, je les inspire, les alimente. ". je dis toujours " nous " et jamais " je " par exemple à mon équipe, quand je suis fier des résultats ; je préfère dire que je suis fier d'être dans l'équipe (le fier de nous) VS je suis fier d'être votre manager (le fier de moi) ; ou encore à ma hiérarchie " l'équipe a fait VS j'ai fait ".
  • Le maximum de management horizontal (participatif sur le comment) avec des décisions horizontales quand nécessaire qui ne seront pas justifiées mais expliquées avec sens et assertivité.

4. Piloter les contributions au collectif

Nous avons tous des forces et des axes de progrès ; des facilités et des difficultés ; des contraintes et des libertés... alors plutôt que d'être " focus " sur un individu avec ses résultats propres, je préconise toujours de mesurer et de le faire progresser sur la contribution à une performance collective. L'engagement, la contribution a un collectif donne plus de " sens " que " des résultats isolés " et comme j'aime le dire en faisant l'analogie avec le foot " jouer à 10 engendre plus de difficultés pour gagner le match, nous devons tous être sur le terrain et apporter une contribution minimum à la victoire ".

Au-delà du domaine commercial, j'applique le même principe avec ma team de sapeurs-pompiers sous la forme d'une autoévaluation du niveau de contribution individuelle au collectif avec un pourcentage de chaque contribution sur le total des interventions de l'unité opérationnelle (avec un positionnement pour le collectif : contribution à renforcer/ engagé / bel engagement et fort engagement).

Ce regard avec une remise à " zéro " chaque quadrimestre a vraiment amélioré les engagements et par construction la disponibilité de l'unité opérationnelle qui est aujourd'hui remarquée et reconnue pour cela... et la team est fière de cela !

" Ce n'est pas le fait de porter le même maillot qui fait une équipe, c'est de transpirer ensemble..." Aimé Jacquet

5. Positionner l'exigence

L'exigence porte souvent sur les résultats alors que les résultats représentent le passé (qui peut changer le passé ?) et qu'ils reposent non pas sur le fruit du hasard mais bien sûr de la méthode, de l'entraînement, des mises en oeuvre et des retours d'expérience...

Personnellement, je préfère positionner l'exigence sur les moyens en construisant " le comment " avec l'équipe pour accompagner les réussites avec l'exigence bienveillante (pilotage des moyens plus que des résultats et accompagnement des compétences ; concept de flow (1))

La bienveillance est de mise quand de vrais "facteurs" externes non maîtrisable sont arrivés et que l'agilité des moyens et leur mise en oeuvre ont compensé en partie la perte de performance.

L'exigence forte sur la mise en oeuvre des moyens décidés et en cas de non mise en oeuvre (volontaire), pas de fausse bienveillance qui équivaudrait à du laxisme.

Nous le savons, la vraie bienveillance impose de l'exigence pour faire grandir, et c'est pourquoi je préfère parler d'une posture de pilotage équilibrée entre exigence et bienveillance sur cette base.

Attention, manager c'est décider et souvent nos idées et actions prennent des hypothèses positives (heureusement) en occultant les effets négatifs. Nous devons toujours "peser" nos décisions d'exigence sur la balance : bénéfices/risques.

6. Et pour finir, animer un sentiment : la fierté d'appartenance

La fierté joue un rôle essentiel dans l'implication des équipes, sans celle-ci, sans cet esprit d'appartenance, difficile d'être heureux au travail ; la fierté est facteur d'épanouissement et d'engagement et repose sur quelques piliers : la confiance, le respect, la considération, le partage, la quête de sens... tout est dit !

Et nous arrivons dans la période des conventions de rentrée où beaucoup d'entreprises travaillent le fond avec les résultats, les actions à venir, les offres, les attendus... sans se rappeler que les premiers objectifs à atteindre d'une convention commerciale sont de donner envie, de motiver, de créer du collectif et de se sentir fiers pour retourner au combat avec un esprit de guerrier !

Alors faisons rugir le plus souvent possible ce petit cri " Yes ! Fier d'être ! " et n'oublions pas le sens de nos métiers... de nos missions.

Et n'oublions pas, souvent ce n'est pas le métier que l'on fait qui est difficile, mais les conditions dans lesquelles on l'exerce !

Pour en savoir plus

Hervé Aulner est directeur commercial au sein du Groupe La Poste. Intervenant à IAE School of Management, il est également officier sapeur-pompier et dirige une caserne depuis plus de 20 ans.

(1) https://ceclair.fr/les-8-caracteristiques-de-letat-de-flow

 
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